Lumière sur les parois ferroélectriques

Résultat scientifique

Pour la première fois, une équipe de chercheurs a observé que la paroi séparant deux domaines d’un matériau ferroélectrique présente une polarisation non nulle, contrairement à ce qu’il était admis jusque là. L’exploitation de la polarisation interne de ces parois ouvre des perspectives encourageantes pour l’accroissement des capacités de stockage des mémoires numériques.

Les matériaux ferroélectriques sont constitués de régions microscopiques où la polarisation électrique est figée dans une même orientation. La frontière séparant deux domaines ferroélectriques de polarisation opposée était jusqu’à présent méconnue, notamment à cause de sa taille qui n’excède pas quelques dizaines de nanomètres. Des chercheurs de l’Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg sont toutefois parvenus à l’observer grâce à l’imagerie laser et à des simulations numériques.

Il était généralement admis que les parois ferroélectriques présentent une configuration de type Ising, autrement dit une polarisation interne nulle. Menée sur deux matériaux modèles, car ayant fait l’objet de récentes études théoriques, cette exploration des parois a révélé qu’il n’en est rien. En effet, l’observation par microscopie laser a mis en évidence une émission optique non linéaire localisée sur les parois. L’analyse de cette réponse optique, et sa modélisation, a montré une déviation nette par rapport à celle que donnerait une polarisation nulle de type Ising. Et selon la symétrie du matériau étudié, il a été observé une polarisation parallèle ou perpendiculaire. Elle est donc non seulement non nulle, mais elle peut prendre plusieurs orientations. Ces parois ont été appelées parois de Néel, ou Bloch selon l’orientation de la polarisation, par analogie avec les parois observés dans les matériaux ferromagnétiques.

L’organisation en domaines de matériaux ferroélectriques permet d’ores et déjà le codage binaire de l’information dans les mémoires numériques. En offrant la possibilité d’exploiter en plus la polarisation interne des parois, cette étude contribue à la course vers l’accroissement de la capacité de stockage numérique. Elle permet aussi de franchir un pas supplémentaire dans l’observation des parois ferroélectriques en révélant leur structure en trois dimensions.

Les travaux présentés impliquent des chercheurs de l’Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg (IPCMS, CNRS/Univ. Strasbourg), de l’Université de Genève et du KTH Royal Institute of Technology de Stockholm. Ils sont publiés dans la revue Nature Communications.

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La partie à gauche de l’image représente l’organisation de la polarisation (flèches) Informations complémentaires dans des parois séparant deux domaines opposés (couleurs rouge et verte). À droite, la configuration tridimensionnelle d’une paroi chirale révélée par imagerie optique non-linéaire dans un cristal photonique ferroélectrique. L’analyse de la lumière émise par cette paroi (plot polaire) révèle une polarisation préférentielle le long de la paroi, en accord avec une structure interne de type Bloch.
© SaliaCherifi-Hertel, IPCMS (CNRS/ Université de Strasbourg).

 

En savoir plus

Non-Ising and chiral ferroelectric domain walls revealed by nonlinear optical microscopy 
S. Cherifi-Hertel, H. Bulou, R. Hertel, G. Taupier, K. Dodzi (Honorat) Dorkenoo, C. Andreas, J. Guyonnet, I. Gaponenko, K. Gallo & P. Paruch 
Nature Communications (2017), doi:10.1038/ncomms15768

 

Informations complémentaires

Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg (IPCMS, CNRS/Univ. Strasbourg)

Contact

Jean-Michel Courty
Chargé de mission institut