Comment nos bronches évacuent le mucus

Résultat scientifique Physique et biologie

En reconstituant in vitro un tissu bronchique, des chercheurs ont mis en évidence à l’échelle centimétrique une organisation spontanée des cellules ciliées à l’origine d’un mouvement circulaire du mucus.

Lorsque l’on respire, les allergènes, particules polluantes et autres pathogènes inhalés sont piégés par une couche de liquide visqueux et collant, appelé mucus, qui est présent à la surface de nos voies respiratoires. Le mucus “contaminé” est alors éliminé grâce à l’action coordonnée de milliards de cils, sortes de petit bras actifs accrochés à la paroi bronchique, qui propulsent le mucus jusque dans la gorge où il est avalé. C’est la clairance mucociliaire.

Dans les maladies respiratoires chroniques comme l’asthme sévère, ce mécanisme de protection est défaillant mais les raisons restent incomprises car ces maladies extrêmement complexes ont des causes multifactorielles. En particulier, les mécanismes physiques de la clairance mucociliaire sont encore largement inexplorés.

Des physiciens et des biologistes d’Aix-Marseille ont cherché à savoir comment les cellules s’organisent pour transporter le mucus sur de longues distances. Pour cela, ils ont reconstitué in vitro un épithélium bronchique, à partir de cellules humaines prélevées par bronchoscopie sur des patients sains ou souffrant d’asthme. Ces tissus biomimétiques cultivés dans des chambres de taille centimétrique présentent l’avantage d’être observable en temps réel par vidéo microscopie.

À partir des observations, les physiciens ont déterminé des paramètres physiques mesurables tels que la vitesse et la direction d’écoulement du mucus, la densité de cellules ciliées, leur répartition spatiale ainsi que la direction de battement de leurs cils. En particulier, les physiciens ont révélé l’existence de motifs circulaires d’écoulement du mucus dont la taille, de quelques dizaines de microns jusqu’à l’échelle centimétrique, est déterminée par la densité de cellules ciliées. Ces motifs sont le résultat surprenant d’une fine autorégulation spatiale à la fois de la densité de cellules ciliées et de leur direction de battement : au centre du domaine circulaire la densité ciliaire est de l’ordre de quelques % et les directions de battement sont aléatoires. En s’éloignant radialement du centre, la densité de cellules ciliées augmente jusqu’à atteindre des valeurs de 70 % sur les bords du domaine, et la direction de battement des cils devient tangente à l’écoulement du mucus dont la vitesse peut atteindre 200 μm/s.

Il reste désormais à relier ces écoulements circulaires avec le mouvement global d’évacuation du mucus hors des bronches. Ce sera l’objet de prochaines manipulations utilisant cette fois des échantillons de trachées.

Alors que les maladies respiratoires chroniques sont en expansion dans un monde de plus en plus urbanisé, ce travail fournit des pistes pour établir une sorte de carte d’identité de la clairance mucociliaire chez les patients atteints de ces pathologies.

Ce travail est publié dans la revue Scientific reports.

Image retirée.
Transport circulaire du mucus à la surface de l’épithélium. Cette image résulte de la superposition des images d’un film de 2 mns. Chaque trainée correspond à la trajectoire d’une particule piégée dans le mucus. La barre d’échelle correspond à 200 micromètres.
© CINAM (CNRS/AMU)

 

 

En savoir plus

Spatiotemporal organization of cilia drives multiscale mucus swirls in model human bronchial epithelium 
M-K. Khelloufi, E. Loiseau, M. Jaeger, N. Molinari, P. Chanez, D. Gras et A. Viallat 
Scientific reports (2018), doi:10.1038/s41598-018-20882-4 
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Informations complémentaires

Centre interdisciplinaire de nanosciences de Marseille (CINAM, CNRS/ Université Aix-Marseille) 
Laboratoire de mécanique, modélisation et procédés propres (M2P2, CNRS/Centrale Marseille/AMU) 
Institut montpelliérain Alexander Grothendieck (IMAG, CNRS/Univ. Montpellier) 
C2VN (AMU/Inserm/INRA)

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Communication CNRS Physique