Conversion entre courant de charge et courant de spin : l’efficacité des systèmes bidimensionnels
La conversion de courant de charge (courant électrique) à courant de spin (aimantation transportée par électrons) et la conversion inverse sont les opérations de base des dispositifs de spintronique. Les auteurs décrivent comment comparer l’efficacité des deux types de conversion. Ils montrent la meilleure efficacité des systèmes bidimensionnels comparés aux systèmes tridimensionnels et aussi l’erreur fréquente des interprétations de conversions bidimensionnelles.
La spintronique élargit le domaine l'électronique en exploitant non seulement la charge mais aussi, le spin et donc l'aimantation de l'électron. Au début de la spintronique, les conversions entre courant de charge et courant de spin ont été réalisées par le filtrage de spin dans des métaux magnétiques. Aujourd’hui, des conversions plus efficaces sont obtenues en utilisant des effets du couplage spin-orbite, une correction relativiste à la physique quantique. Dans les métaux non-magnétiques lourds tridimensionnels (3D) tels que le platine ou le tungstène, le couplage spin-orbite est important et un courant de charge 3D peut se convertir en courant de spin 3D par l'effet Hall de spin (figure a). Dans les systèmes bidimensionnels (2D) tels que les gaz d’électrons à la surface de matériaux dits isolants topologiques, la brisure de symétrie due à la surface verrouille les degrés de liberté de mouvement et de spin des électrons et génère des conversions très efficaces entre courant de charge 2D et courant de spin 3D (effet Edelstein). Des conversions semblables existent aussi à certaines interfaces entre matériaux (interfaces Rashba).
Il est important de pouvoir comparer les taux de conversion des systèmes 3D et 2D pour sélectionner les meilleurs systèmes qui pourront être intégrés dans des dispositifs ou des expériences. Cependant, on ne peut pas paramétrer les conversions de courants 2D avec les paramètres habituels pour courants 3D, comme cela est improprement fait dans beaucoup d’articles en rendant confuse la situation actuelle. Dans ce travail, des physiciens de l'Institut Jean Lamour (IJL, CNRS/Univ. Lorraine) à Nancy et de l'Unité mixte de physique CNRS/Thales à Palaiseau montrent une façon simple de paramétrer les conversions et de comparer quantitativement les efficacités de conversion dans les systèmes 3D et 2D. Ils comparent les résultats expérimentaux de divers systèmes et, par exemple, mettent en évidence une efficacité de production d'un courant de charge 10 fois plus grande avec l'isolant topologique α-Sn par rapport au métal Pt (figure b). L’intérêt des systèmes 2D pour des conversions efficaces et le développement de composants de spintronique à faible consommation apparait ainsi nettement.
Références
Compared efficiencies of conversions between charge and spin current by spin-orbit interactions in two- and three-dimensional systems. Juan Carlos Rojas-Sanchez et Albert Fert, Physical Review Applied, le 17 mai 2019.
DOI: 10.1103/PhysRevApplied.11.054049