Convertir le spin des électrons en lumière polarisée sans champ magnétique extérieur

Résultat scientifique Physique quantique

Des chercheurs viennent de démontrer l’émission de lumière polarisée circulaire à partir d’une seule boîte quantique sans champ magnétique extérieur. Ces travaux ouvrent la voie à la mise au point de nouveaux dispositifs pour stocker l’information quantique.

Au cours de la dernière décennie, un intérêt et un effort de recherche continu ont été consacrés à l’étude de dispositifs émettant de la lumière polarisée, tels les « Spin-Light Emitting Diodes (Spin-LED) ».

De tels dispositifs offrent la possibilité de propager l’information contenue dans un bit magnétique sur de longues distances et à grande vitesse. Pour cela, il faut convertir le spin « haut » ou « bas » des électrons en photons polarisés circulairement à droite ou circulairement à gauche, émis par la diode.

Des chercheurs de l’Institut Jean Lamour (CNRS/Univ. Lorraine), du Laboratoire de physique et chimie des nano-objets (CNRS/Univ. Toulouse/INSA Toulouse) et de l’Unité mixte de physique CNRS/Thales, en collaboration avec deux autres laboratoires chinois, viennent de démontrer l’émission de lumière polarisée circulairement à partir d’une boîte quantique unique, sans appliquer de champ magnétique extérieur. Un degré de polarisation circulaire de la lumière émise pouvant atteindre 35 % est obtenu, ce qui est un record. Cela signifie que sur 100 photons émis, 67 vont être polarisés circulairement à droite et 33 vont être polarisés circulairement à gauche. Ils ont été émis par recombinaison d’électrons possédant respectivement des spins -1/2 et +1/2. L’information portée par le spin de l’électron est ainsi convertie en information contenue dans la polarisation des photons. Ce résultat est obtenu en combinant une électrode CoFeB ultra-mince – cette couche magnétique oriente le spin des électrons – avec des boîtes quantiques InGaAs de type p (avec un trou résident) pour la partie LED, l’émission d’un photon se produisant lors de la recombinaison d’un électron avec un trou. Outre son intérêt en vue du développement de sources ultra-compactes de photons polarisés, cette démonstration expérimentale montre la faisabilité de l’initialisation par voie électrique du spin d’un électron confiné dans boîte quantique unique sans champ magnétique externe.

Par ailleurs, les chercheurs ont mesuré un décalage Overhauser (différence d’énergie entre les raies d’émission de la LED polarisées circulaires à droite et à gauche) de plusieurs micro électronvolts à champ magnétique nul. Ce décalage change de signe lorsque l’orientation des spins électroniques injectés est inversée. Cela démontre que le spin des électrons est transféré aux spins des noyaux des atomes constituant la boîte quantique. Il est donc possible d’initialiser par voie électrique les spins des noyaux (en plus du spin de l’électron confiné) dans une boite quantique unique sans champ magnétique externe.

Ces résultats pourraient ouvrir des perspectives dans le domaine de l’information quantique, où une telle boîte quantique constituerait un nouveau support de stockage.

 

Image retirée.
(a) Image en microscopie électronique à transmission haute résolution de l’injecteur Ta / CoFeB / MgO / GaAs.
(b) Schéma de la structure spin-LED. Un seul plan de boites quantiques InAs est intégré dans la région intrinsèque de la jonction p-i-n de la LED.
(c) Image au microscope à force atomique d’un plan de boites quantiques InAs avec une densité de 1,6.1014m-2. Le diamètre moyen des boites est d’environ 30 nm et leur hauteur de 9 nm

 

Référence

Electrical initialization of electron and nuclear spins in a single quantum dot at zero magnetic field
F. Cadiz, A. Djeffal, D. Lagarde, A. Balocchi, B. Tao, B. Xu, S. Liang, M. Stoffel, X. Devaux, H. Jaffres, JM. George, M.Hehn , S. Mangin, H. Carrere, X. Marie, T. Amand, X. Han , Z. Wang, B. Urbaszek, Y. Lu , P. Renucci
Nano Lett. (2018), DOI : 10.1021/acs.nanolett.7b05351

Contact

Yuan Lu, chargé de recherche CNRS
Pierre Renucci
Professeur à l’INSA de Toulouse et chercheur au LPCNO
Bernhard Urbaszek
Professeur à l’INSA de Toulouse et chercheur au LPCNO
Communication CNRS Physique