Un modèle mathématique pour comprendre comment l’horloge du foie se synchronise au rythme des repas

Résultat scientifique

Si notre horloge biologique centrale est régulée par l’alternance du jour et de la nuit, d’autres horloges, soumises aux rythmes des échanges énergétiques, jouent un rôle physiologique crucial dans les différents organes. L’horloge du foie, organe régulateur de l’énergie et véritable usine chimique, joue ainsi un rôle prépondérant dans notre métabolisme. En collaboration avec des biologistes, des physiciens ont modélisé mathématiquement cette horloge biologique hépatique et ont testé ce modèle avec succès sur des données expérimentales, ouvrant la voie à des protocoles chronothérapeutiques.

Notre organisme est soumis en permanence à l’alternance des jours pendant lesquels nous sommes actifs et nous nous nourrissons, et des nuits, périodes de repos et de jeûne. Pour gérer en continu ces apports et dépenses d’énergie, et orchestrer notre métabolisme de manière adaptée, notre organisme doit anticiper les variations périodiques liées à cette alternance. Pour cela, nos différents organes sont en permanence informés de la phase du cycle à laquelle ils se trouvent par des horloges internes, qui se synchronisent en partie sur l’horloge centrale, alignée sur le cycle jour/nuit, mais principalement sur les rythmes de prise de nourriture ou d’effort. C’est en particulier le cas du foie, organe métabolique majeur qui régule notamment la glycémie. Lorsque l’horloge hépatique est perturbée, des désordres métaboliques sévères tels que l’obésité ou le diabète de type 2 peuvent survenir.

Afin de mieux comprendre les mécanismes impliqués dans ces dysfonctionnements, une collaboration entre des biologistes de l’Unité Récepteurs Nucléaires, maladies cardio-vasculaires et diabète (Institut Pasteur de Lille/INSERM/Univ. Lille 2) et des physiciens du Laboratoire de Physique des Lasers, Atomes, Molécules (PhLAM, CNRS/Lille 1) a permis de concevoir le premier modèle mathématique décrivant la synchronisation de l’horloge hépatique par les variations cycliques de l’état énergétique des cellules. Ces travaux sont publiés dans la revue Cell reports. Les chercheurs ont généralisé des modèles mathématiques déjà existants en y incorporant des senseurs métaboliques importants, qui influent sur l’horloge en fonction de l’état énergétique de la cellule. Ce modèle mathématique décrit la dynamique de l’horloge au moyen de 16 équations différentielles transcrivant l’évolution temporelle de la concentration de protéines. Ils ont testé puis validé ce modèle sur des données expérimentales de l’horloge hépatique de souris. Ce modèle reproduit aussi les principales perturbations de l’horloge observées lors d’un régime riche en graisse et permet d’identifier les voies de signalisation qui « recalent » cette horloge.

Ces résultats permettent d’espérer que des mécanismes importants menant à la dérégulation de l’horloge pourront être identifiés par l’analyse du modèle mathématique. Un protocole chronothérapeutique pourrait ainsi être proposé pour restaurer un fonctionnement normal de l’horloge lorsque cette dernière est affectée par certaines pathologies métaboliques.

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L’alternance des jours et des nuits entraîne chez la plupart des animaux, comme la souris représentée ici, une succession de périodes d’activité, où ils se nourissent, et de repos, où ils jeûnent (pour la souris, respectivement la nuit et le jour). Le foie, organe de régulation métabolique, anticipe ces variations grâce à une horloge biologique composée de gènes et de protéines en interaction. Les variations temporelles d’activité des principaux gènes de l’horloge hépatique des souris sont representées ici pour un régime normal, ces oscillations pouvant être perturbées lors d’un stress nutritionnel ou dans une pathologie métabolique.
© Marc Lefranc/PhLAM

 

En savoir plus

A Mathematical Model of the Liver Circadian Clock Linking Feeding and Fasting Cycles to Clock Function 
A. Woller, H. Duez, B. Staels et M. Lefranc 
Cell Reports (2016), doi:10.1016/j.celrep.2016.09.060

 

Informations complémentaires

Laboratoire physique des lasers, atomes et molécules (PhLAM, CNRS/Univ. Lille 1)

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