Cinq jeunes physiciennes reçoivent une bourse « L'Oréal-Unesco Pour les Femmes et la Science »

Femmes en physique Distinction

Camille Scalliet (L2C), Farsane Tabataba-Vakili (C2N), Delphine Geyer (LP-ENS Lyon), Sophie d’Ambrosio (CNRS-Thales) et Marylou Gabrié (LPS) sont lauréates d’une bourse L’Oréal-UNESCO "Pour les femmes et la science" 2018, qui a pour but de promouvoir les femmes en science et de les encourager à poursuivre leur carrière scientifique.

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© Carl Diner pour la Fondation L’Oréal 

Camille SCALLIET
Doctorante au Laboratoire Charles Coulomb (L2C, Université de Montpellier/CNRS)
"Eclaircir les propriétés de la matière amorphe"

Les solides cristallins (sel de cuisine, cristal de diamant, etc.), sont constitués, tout comme les métaux, d’atomes assemblés dans un ensemble ordonné. à l’inverse, le verre ou le sable sont des solides dits amorphes. Les particules qui les composent ont des positions désordonnées et la façon dont ces solides se déforment, cassent ou conduisent la chaleur est totalement différente de celle des solides cristallins. Camille Scalliet, doctorante au laboratoire Charles Coulomb à l’Université de Montpellier, tente de comprendre comment ce désordre à l’échelle microscopique confère aux solides amorphes leurs propriétés physiques uniques. Elle s’intéresse à une nouvelle phase amorphe de la matière, dont l’existence était jusque-là insoupçonnée. « Découverte très récemment dans un développement mathématique abstrait, cette phase complexe semble posséder des propriétés particulièrement intéressantes », explique  la scientifique, dont le matériel de recherche est constitué d’outils mathématiques sophistiqués et de simulations numériques poussées. Appréhender la physique des matériaux amorphes pourrait ouvrir la voie à la conception de matières inédites aux propriétés thermiques, mécaniques ou optiques innovantes.

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© Carl Diner pour la Fondation L’Oréal 

Farsane TABATABA-VAKILI
Doctorante du Centre de nanosciences et de nanotechnologies (C2N, CNRS/Université Paris-Sud)
« Optimiser l'éclairage par LEDs grâce aux micro et nanotechnologies »

L’efficacité énergétique des diodes électroluminescentes (LEDs) à luminosité modérée les ont rendues incontournables dans notre quotidien. Cependant, utilisées à forte luminosité, leur rendement s’effondre du fait des propriétés intrinsèques des matériaux qui les composent1 , les rendant ainsi moins pertinentes. Ce phénomène peut être évité en utilisant des microlasers comme source de lumière bleue. Les recherches que Farsane Tabataba-Vakili mène dans le cadre de sa thèse visent ainsi à améliorer ces rendements à forte brillance. Au Centre de nanosciences et de nanotechnologies, la jeune scientifique cherche à démontrer expérimentalement une technologie d’éclairage innovante, qui utilise des microlasers en nitrure2 , produisant de la lumière bleue qui excite des phosphores jaunes. « La micro et nanofabrication en salle blanche, c’est-à-dire la salle la plus propre possible pour pouvoir travailler avec des matériaux à l’échelle de dizaines de nanomètres, constituent mes principales activités. » Les aboutissements attendus de ces recherches sont d’une part, l’optimisation énergétique et la longévité des LEDs, notamment à forte brillance, afin de faciliter l’éclairage portatif ou autoalimenté en zones reculées ; et d’autre part, l’amélioration du traitement de l’information grâce à la lumière, dans de nouvelles puces d’ordinateurs qui utilisent les technologies quantiques.
  • 1 Les LEDs blanches sont constituées d’une puce de semi-conducteurs dits de nitrure (composés constitués d’azote et d’un métal du groupe III comme le gallium ou l’aluminium), émettant de la lumière bleue, et de phosphore émettant une lumière jaune.
  • 2Ces microlasers intégrés dans un circuit photonique sont fabriqués à partir de microdisques nitrures (composés constitués d’azote et d’un métal) avec des guides suspendus et des réseaux de découplage aux deux extrémités des guides.
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© Carl Diner pour la Fondation L’Oréal 

Delphine GEYER
Doctorante au Laboratoire de physique de l'École normale supérieure de Lyon (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1)
"Étudier la propagation sonore pour comprendre les mouvements de masse"

Bancs de sardines, colonies de bactéries, ou encore nuées d’oiseaux : les mouvements collectifs massifs et cohérents sont observés à tous les niveaux du vivant. Mais comment sont-ils possibles sans qu’aucun moyen de communication efficace n’existe sur des échelles si étendues ? C’est la question sur laquelle s’est penchée Delphine Geyer qui effectue sa thèse au laboratoire de Physique de l’École normale supérieure de Lyon. «  Mon objectif est de comprendre l’organisation collective du vivant, mais aussi de développer de nouveaux matériaux actifs à partir de particules synthétiques présentant des propriétés similaires d’organisation collective. » Delphine en a d’ores et déjà conçu un et elle a pu démontrer expérimentalement la propagation de sons dans ces assemblées de particules autopropulsées. L’étude de ces ondes sonores lui a permis de créer une méthode quantitative générique décrivant la dynamique de groupe valable pour tous types d’individus. Les applications de ses recherches sont doubles. Elles donneraient, d’une part, la possibilité de mieux prédire les mouvements de foules humaines, afin notamment de réduire les incidents liés aux rassemblements de grande envergure. Et, d’autre part, elles permettraient d’utiliser la compréhension de cette mise en mouvement pour motoriser de manière collective des éléments de la matière molle (tissus biologiques, filaments d’actine...), qui deviendraient ainsi des micro-robots potentiellement utilisables dans la médecine de précision (comme pour l’administration de médicaments).

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© Carl Diner pour la Fondation L’Oréal 

Sophie D’AMBROSIO
Post-doctorante au sein de l'Unité mixte CNRS-Thales (Université Paris sud/Université Paris-Saclay)
"Au-delà des supercalculateurs, les supra-supercalculateurs, plus puissants et plus écologiques"

Simulation du réchauffement climatique, prédiction des tsunamis, élaboration de nouveaux médicaments, ou encore amélioration de dispositifs industriels à haute performance : autant d’opérations et d’applications qui ont été bouleversées et accélérées par les supercalculateurs. Devenus indispensables dans un grand nombre de secteurs d’activité grâce à leur puissance de calcul parvenant au million de milliard d’opérations par minute, les supercalculateurs atteignent aujourd’hui leurs limites du fait de leur importante consommation d’énergie. Comment relever ce défi tout autant technologique qu’économique et écologique ? L’une des options envisagées par Sophie D’Ambrosio, post-doctorante à l’Unité mixte CNRS-Thales, est l’utilisation de supraconducteurs1 dits « à haute température critique », plus froid que froid. La chercheuse travaille ainsi à l’élaboration de dispositifs électroniques alternatifs à base d’un des supraconducteurs à haute température les plus prometteurs : l’oxyde YBa2Cu3O7. «  Possédant une résistance nulle en dessous de 100 Kelvin2 en moyenne, ils pourraient réduire la consommation énergétique par un facteur d’ordre quatre (c’est-à-dire 10  000).  » Ce nouveau matériau permettrait d’augmenter la puissance de calcul des futurs supercalculateurs pour toujours accroître notre compréhension du monde, tout en assurant le transport et le stockage d’informations à très faible coût énergétique. Une réponse écologique aux challenges technologiques de demain.

  • 1 Les supraconducteurs sont des matériaux qui exhibent le phénomène de la supraconductivité (ou supraconduction), c’est-à-dire l’absence de résistance électrique, en dessous d’une certaine température critique Tc.
  • 2Le Kelvin est l’unité de température thermodynamique (système international).
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© Carl Diner pour la Fondation L’Oréal 

Marylou GABRIE
Doctorante au Laboratoire de physique statistique (LPS, Ecole normale supérieure/Université PSL-Paris sciences & lettres)
"La physique statistique à la découverte de mécanismes fondamentaux de l’intelligence artificielle"

Les algorithmes dits d’apprentissage profond ont révolutionné l’intelligence artificielle ces dix dernières années. Inspirés des réseaux de neurones, ils apprennent à des programmes multiparamètres des tâches très complexes à partir d’une base de données d’exemples. Or, les mécanismes de cet apprentissage restent incompris, notamment du fait du nombre considérable de paramètres ajustés. Les solutions algorithmiques actuelles reposent sur des considérations empiriques et sont coûteuses en ressources  : puissance de calcul, capacités de stockage, etc. Afin de résoudre cette problématique, au cours de sa thèse à l’École normale supérieure de Paris, Marylou Gabrié s’est intéressée à la physique statistique, utilisée notamment pour l’étude de systèmes naturels tels que les gaz, constitués de milliards de molécules. « Nous exploitons les progrès récents de ce champ pour étudier l’apprentissage profond. Cette approche interdisciplinaire originale permet de combiner approximations physiques et expérimentations numériques. » 
L’aboutissement de ces recherches pourraient dans le futur apporter une meilleure compréhension des réseaux de neurones de l’intelligence artificielle et améliorer ainsi leur performance et leur fiabilité. Leur impact environnemental pourrait également être optimisé en réduisant les temps de calcul conséquents, qui impliquent une consommation électrique importante. 

 

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Communication CNRS Physique