Comment la flexion des cils détecte des particules en suspension

Résultat scientifique

Dans le vivant, les cils sont des capteurs extrêmement sensibles pour la perception. En mimant la mécanique des cils en laboratoire, les physiciens analysent pour la première fois leur remarquable capacité à détecter des particules en suspension dans le milieu liquide environnant.

Chez la plupart des animaux et des micro-organismes, les sens de l'ouïe, de l'odorat et du toucher impliquent des protubérances cellulaires allongées appelées cils. Sous l’effet de l’écoulement d’un fluide, ces cils fléchissent et déclenchent la réponse de récepteurs spécifiques enfouis proche de leur base. Le cil joue ainsi le rôle d'un capteur mécanique et est la première étape dans l’information perceptive. Par exemple, en laboratoire, l’amplitude de flexion d’un cil sous l’écoulement d’un liquide homogène fournit une mesure directe de la viscosité de ce liquide. Dans des environnements naturels cependant, le liquide dans lequel baigne les cils n’est généralement pas homogène, à cause de la présence de particules ou d’autres micro-organismes. Afin de comprendre la sensibilité des cils à cet environnement complexe, les chercheurs et chercheuses ont mimé leur comportement mécanique en étudiant un cil artificiel, une fibre élastique fixée à une extrémité, soumis à l’écoulement de suspensions granulaires (figure). En combinant des expériences d'imagerie de fluorescence et des modélisations théoriques, ils montrent que, si la flexion moyenne de la fibre résulte de l'écoulement continu du liquide, ses fluctuations résultent principalement des contacts entre la fibre et les particules en suspension, et sont directement reliées à leur concentration. Les résultats suggèrent de plus que les cils biologiques pourraient détecter des particules aussi petites que leur diamètre. Ces études ont été conduites par le Laboratoire Jean Perrin (LJP, CNRS/Sorbonne Univ.) en collaboration avec les centres de recherche de Nestlé à Lisieux et à Lausanne, et sont publiées dans la revue PNAS. Elles fournissent le cadre mécanique et statistique pour décrire la sensibilité des cils biologiques aux particules présentes dans leur environnement.

ImagePrevost
Figure. A gauche, schéma de principe de la mesure le cil est mimé par une fibre cylindrique de hauteur 435 µm et de diamètre 100 µm. Celle-ci est fixée à une extrémité et recouverte de particules fluorescentes (en vert) à son extrémité libre. Sous l'effet du flux hydrodynamique représenté par les flèches bleues et des chocs avec les particules en suspension (en orange), le cil fléchit avec une amplitude d. A droite, image par microscopie d'épifluorescence de l'extrémité libre de la fibre (vue de dessus). Le cercle en pointillé vert représente la section de la fibre et la flexion d est mesurée par le déplacement de ce cercle sous l'effet du flux hydrodynamique. 

 

Référence

A bending fluctuation-based mechanism for particle detection by ciliated structures. J.-B. Thomazo, B. Le Révérend, L.-L. Pontani, A. M. Prevost et E. Wandersman, PNAS, paru le 3 août 2021.
DOI : 10.1073/pnas.2020402118
Texte disponible sur les bases d'archives ouvertes HAL.

Contact

Alexis M. Prevost
Directeur de recherche CNRS, Laboratoire Jean Perrin
Elie Wandersman
Enseignat-chercheur, Laboratoire Jean Perrin
Communication CNRS Physique