Croissance in situ d'îlots de zirconène suspendus dans les pores du graphène
Des scientifiques ont synthétisé de façon contrôlée une feuille atomiquement fine de zirconium, un métal connu pour ses propriétés anti-corrosion. Ce résultat ouvre la voie à de nouvelles applications dans le domaine de la protection de surfaces dans des environnements extrêmes.
Références
In Situ Growth of Suspended Zirconene Islets Inside Graphene Pores. R. G. Mendes, H. Q. Ta, T. Gemming, H. van Gog, M. A. van Huis, A. Bachmatiuk, M. H. Rümmeli, Adv. Funct. Mater. 2025, 35, 2412889. – Publié le 10 septembre 2024
Doi :10.1002/adfm.202412889
L'exploration des matériaux bidimensionnels (2D) a révolutionné divers domaines de la nanotechnologie, car leurs propriétés exceptionnelles ouvrent la voie à des applications futures allant de l'électronique à l'administration de médicaments. Parmi ces matériaux, les métaux 2D, également connus sous le nom de métallènes, présentent des arrangements planaires atomiquement minces de métaux élémentaires. Cette classe de matériaux, qui n’ont pas encore été synthétisés, suscite un effort de recherche considérable depuis quelques années en raison de son potentiel exceptionnel en nanoélectronique, dans le domaine des capteurs, en catalyse, ou encore pour le stockage et la conversion de l'énergie. Cependant, la synthèse des métallènes reste un défi car ces matériaux ne peuvent pas être simplement exfoliés et transférés comme d'autres structures foliaires d’épaisseur atomique, comme par exemple le graphène, qui peut facilement être étudié en tant que structure autonome. En outre, la nature des liaisons métalliques favorise la formation de nanoparticules 3D au lieu des structures 2D recherchées. De fait, très peu de travaux ont été menés sur les metallènes isolés. Seuls quelques-uns ont pu être synthétisés sur d'autres substrats métalliques spécifiques, et encore moins ont pu être totalement isolés. Bien que la stabilité de nombreux métallènes ait été théoriquement prédite, la fabrication pratique de métaux 2D reste un défi encore à relever.
Ces recherches ont été menées dans le laboratoire suivant
- Interfaces Confinement Matériaux et Nanostructures (ICMN, CNRS / Université d'Orléans)
Dans une étude récente, une coopération internationale incluant un chercheur Orléanais présente une approche novatrice pour la synthèse in situ d'îlots de zirconène suspendus au-dessus de pores présents dans une feuille de graphène en utilisant l'irradiation par faisceau d'électrons. Contrairement aux méthodes précédentes reposant sur une croissance complexe sur des substrats métalliques, leur approche permet la fabrication de structures de zirconène autoportantes avec une précision à l'échelle atomique. Ce procédé est particulièrement intéressant parce qu’il présente une nouvelle voie de synthèse de métallènes d’épaisseur atomique, tout en offrant un contrôle précis sur leur croissance et leur dégradation. L'originalité de ces résultats réside aussi dans l'observation systématique de la formation et de la stabilité des îlots de zirconène sous irradiation électronique. Ce travail permet ainsi l’étude des interactions dynamiques entre les atomes de zirconium et le graphène, mettant en lumière le rôle clé de l'ingénierie des défauts dans le confinement et la stabilisation des couches bidimensionnelles de zirconène.

Les applications potentielles de cette recherche sont nombreuses, le zirconène pouvant être envisagé comme revêtement protecteur ultra-mince pour des matériaux soumis à des environnements extrêmes, notamment dans les domaines de l’aérospatiale, de l’énergie nucléaire et de l’électronique haute performance. L'exceptionnelle résistance à la corrosion et la stabilité thermique du zirconène en font en effet un matériau clé pour les technologies de protection de nouvelle génération. De plus, cette étude ouvre la voie à une exploration plus large des métallènes dans les domaines de la nanoélectronique, de la catalyse et du stockage d’énergie. Elle est publiée dans la revue Advanced Functional Materials.